Focus alumni : Portrait de Fatimata SY, créatrice upcycling

Vous êtes une alumni mais également une intervenante chez MOD’SPE. Qu’enseignez-vous aux étudiants ?

Quel lien avez-vous avec l’école MOD’SPE et quels souvenirs gardez-vous de vos années en tant qu’étudiante ?

Je suis une ancienne étudiante de la 3ème promotion de MOD’SPE dans les années 90’. J’ai toujours été liée à MOD’SPE parce que j’ai souvent pris des stagiaires, j’ai même pris une alternance. Je trouve que c’est une école à taille humaine. J’ai beaucoup d’affect avec l’école. J’ai gardé beaucoup de liens.

Quand on est chef de produit, on est amené à travailler avec des stylistes dans l’atelier, voir des prototypes, etc. Je trouve que c’est génial qu’on puisse avoir une approche pratique. Selon moi, on ne peut pas vraiment travailler le produit si on ne connait pas toutes les étapes de la création à la vente du produit.  

– Fatimata SY, Alumni MOD’SPE (Promo 1996)

Quel est votre parcours professionnel en dehors de vos cours chez MOD’SPE ?

Depuis un an et demi, j’ai développé une ligne de maillots de bain grande taille et inclusive, avec une matière issue de déchets plastiques sourcés en mer. Donc ça, c’est une activité que j’ai envie de développer en B-to-B et en série. Les pièces sont fabriquées au Portugal et en France.

L’upcycling

© FatimataSY

Ma problématique en tant que jeune créatrice, c’est que je ne pouvais pas acheter des grosses quantité de matières. Je ne pouvais donc pas produire en série. C’est de là que je me suis intéressée à l’up-cycling et aux stocks dormants. J’ai d’abord travaillé avec des petites séries, des petites quantités. Ce n’était pas forcément un choix stratégique, c’était un choix économique au début. J’ai travaillé dans le sens inverse. J’ai commencé par consommer des petites quantités parce que je n’avais pas le choix économiquement. Produire en série, ce n’est pas viable pour des petites marques comme moi.

Et ensuite, par goût de proposer des pièces uniques et d’avoir envie d’avoir un vestiaire qui soit unique, ça m’a amené à une clientèle particulière qui avait des problématiques morphologiques. C’est comme ça que mon cheminement créatif s’est construit.

Quels sont les défis que vous avez rencontrés en tant que créatrice indépendante ?

En tant que structure artisanale à mon niveau, le COVID m’a énormément mis en danger et je me suis dit : « comment moi, je peux continuer mon métier, me restructurer pour avancer. » Je me suis également rendu compte que la clientèle friande de Made In France n’est pas forcément française. Tous ces questionnements m’ont amené à me demander comment moi je peux continuer à survivre dans mon métier. Comment doit-on changer notre mode de distribution pour atteindre une clientèle qui est déjà là, qui consomme, mais qui a complètement changé ses modes de consommation.

Le vêtement est devenu un accessoire, mais il y a un espèce de dichotomie entre l’envie de consommer de la mode de marque. Le luxe n’a pas ce problème par exemple, et certaines marques premium n’ont pas de problème. Et puis le problème de l’offre complètement délirante, la surproduction, la surconsommation… De nombreuses marques ne prennent pas les bonnes décisions stratégiques, en matière de digital par exemple, et font faillite.

Je me suis donc demandé : ne doit-on pas réfléchir à ce que l’on produit et comment en vient-on à la consommation responsable ? A-t-on besoin de produire autant ? Les gens sont-ils autant en demande et a-t-on besoin d’avoir autant de stock ? Et en même temps, comment peut-on faire pour produire localement ?

Je pense que si la production se relocalise en France, l’industrie textile va se renforcer. Ça va mettre un peu de temps, mais je pense que le COVID aura eu cet aspect positif sur l’industrie de la mode : repositionner un peu les cartes pour tout le monde.

– Fatimata SY, Alumni MOD’SPE (Promo 1996)

Cette année, MOD’SPE fête ces 30 ans. Quels sont vos vœux d’anniversaire pour l’école ?

Étant une ancienne, je vois vraiment l’évolution de MOD’SPE. Je trouve que c’est une évolution très positive. L’école s’est ouverte à de nouvelles formations de plus en plus spécifiques. Il y en a pour tous les goûts et tous les profils d’étudiants. Je crois que c’est ça l’ADN MOD’SPE : pouvoir être soi-même. L’école a démarré avec une formation de chef de produit. Aujourd’hui on peut y étudier le marketing, la communication, le stylisme, la direction artistique et même la Virtual fashion.

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